jeudi 26 mars 2009

les parasites de l'enquête...


voilà maintenant trois mois que je travaille sur cette affaire. Importante, à mes yeux; je m'y investis sans compter les heures. Le travail est difficile, fastidieux. Je dis "je", mais bien évidement, je ne suis pas seul, puisque c'est un groupe entier qui travaille.
J'essaie d'évoluer dans ce dossier. Il faut avancer, découvrir de nouvelles choses, de nouveaux éléments de preuve, identifier de nouveaux auteurs.
Et, je vous assure, c'est loin d'être évident.
Il y a des bonnes périodes, où des découvertes s'enchainent, vous arrivez à comprendre certains points de l'enquête, du déroulement des faits, de la vie des malfaiteurs. Ces périodes sont fastes, font du bien au moral et vous poussent à aller encore plus loin.
Et puis, comme toute bonne chose, il y a son contraire. Les périodes moins bonnes. Où, quoi que vous fassiez, vous n'avancez pas. Une nouvelle piste? on la creuse, on l'exploite pendant des jours et des jours pour, finalement, tomber sur un os. On s'est trompé, c'est une voie sans issue. Ces momnents-là ne sont pas évidents; il faut remettre en question le travail, et trouver autre chose; un autre "os à ronger".
Il faut alors recommencer. Chercher, chercher, et encore chercher. Parfois, on peut chercher plusieurs choses en même temps. Plusieurs axes de travail sont étudiés, plusieurs possbilités.
Et là, vous avez des parasites qui arrivent. Vous êtes sur un axe d'enquête, et vous avez un collègue, qui arrive dans votre bureau, et dit "voilà, j'ai discuté avec untel, et lui, il sait ce qui s'est passé, qui l'a fait". Mais il se trouve que cette version, que l'on vient "vous vendre" n'a rien à voir avec ce que vous avez trouvé jusqu'à maintenant. Rien à voir avec votre axe principal. Et, d'un coup, c'est une autre information, qui arrive; on vous raconte la même histoire, mais pas faite par les mêmes personnes, en vous disant que quelqu'un d'autre sait tout. Que c'est ce "quelqu'un" qui a le butin;
Bref, il est des moments où l'on ne sait plus où donner de la tête. Et, bien sur, pour faciliter les choses, l'un vient de Marseille, et l'autre du Havre. Tandis que le butin serait à Strasbourg!
Allez démêler ce qui est vrai de ce qui ne l'est pas. Peut-être ont-ils tous une part de vérité dans ce qu'ils viennent vous annoncer. Mais ces gens-là viennent vous dire que le travail accompli depuis plusieurs semaines n'est pas bon. Et pourtant, nombre d'éléments découverts vous font penser que vous êtes sur le bon chemin.
C'est sur, l'histoire judiciaire et policière est là pour le démontrer, il faut toujours garder une part de doute, se dire que, peut-être on s'est trompé. Mais les éléments mis bouts à bouts sont difficiles à démonter.
Bref, c'est là que j'en suis aujourd'hui; petit moral...

dimanche 22 mars 2009

Les statistiques ethniques


coeur monde 
Ce débat nait actuellement au sein de la classe politique française, et donc, au travers des médias.
Faut-il, ou non, autoriser les statistiques éthniques? Il faut savoir que, aujourd'hui, ce genre de  recherche est interdite en France.
Voilà ce que j'ai pu trouver sur le net:


1. Pour les statistiques ethniques

Ceux qui défendent leur existence affichent au moins 3 arguments.

Argument 1 : L'ethnicisation de certaines sociétés est une réalité existante

Il y a de fait ethnicisation de la société française depuis 15 ans (depuis 1990).
Ne pas le voir, ne pas vouloir l'évaluer revient à faire l'autruche.
D'ailleurs, certains pays qui connaissent cette situation utilisent les statistiques ethniques.

Argument 2 : Les statistiques ne produisent pas l'augmentation du racisme dans la société

Il serait naïf de croire que la recherche et les statistiques exercent de gros effets dans le champ politique ou social : ce ne sont pas les chercheurs et les résultats de leurs travaux qui transforment la société et les institutions.
Ce n'est donc pas la construction de statistiques ethniques qui produit le racisme.
Au contraire, ce sont les visions raciales et ethniques à l'œuvre dans la société qui produisent le racisme. Les statistiques ne font que le constater et mesurer.

Argument 3 : Les statistiques ne sont qu'un moyen parmi d'autres de connaître le réel pour lutter contre les discriminations.

Le développement des discriminations rend utile la mesure, par des statistiques ethniques, des évolutions et progrès accomplis. Cela a été d'ailleurs réclamé par l'Observatoire européen des phénomènes racistes et xénophobes en 2005.
Il existe, à côté des statistiques, des méthodes complémentaires de lutte contre les discriminations : le « testing », le « CV anonyme », le patronyme ou le prénom
  • Le « testing » pratiqué par SOS Racisme, l'Observatoire des discriminations (université de Paris 1) consiste à envoyer des milliers de CV à des entreprises pour établir de manière quantitative la discrimination ; mais il n'apporte pas une connaissance statistique et systématique des discriminations affectant certains groupes.
  • Le CV anonyme déplace le problème, car la discrimination ne s'exerce pas au moment du premier examen des candidatures, mais aux étapes suivantes de la sélection.

2. Contre les statistiques ethniques

Les adversaires des statistiques ethniques produisent au moins 7 types de réfutations.

Réfutation 1 : La catégorie ethnique est toujours arbitraire

La notion de « catégorie ethnique » varie selon les pays et les époques. Elle est hétérogène et mélange des indications phénotypiques, géographiques, religieuses, nationales, historiques.
Elle n'a donc rien de scientifique.

Réfutation 2 : Les « statistiques ethniques » simplifient et figent le réel

Ces statistiques rassemblent les individus dans des groupes et réduisent ainsi un individu à la couleur de sa peau, par exemple. Or, les choses sont plus complexes.
Par exemple, concernant les origines, on peut pratiquer 3 approches : l'information sur l'ascendance qui pousse à repérer les lieux de naissance des grands-parents ; l'origine déclarée par un individu, information qui est plus ou moins fiable ; l'identité ethno-raciale (fondée sur la couleur de la peau, par exemple). Quelle approche serait valable ?
Si on simplifie le réel, il est impossible d'établir des politiques publiques qui soient souples et tiennent compte de trajectoires individuelles.

Réfutation 3 : Les groupes concernés étant instables, ces statistiques sont trompeuses

De nombreux individus échappent à ces statistiques.

Réfutation 4 : Ces statistiques construisent une représentation malsaine de la société

Elles conduisent à juxtaposer des ethnies, des races, des cultures.
Elles aboutissent à induire des logiques de racialisation : elles représentent le corps social en termes ethniques et raciaux, alors que les CSP (catégories socio - professionnelles) ne concernent que les relations dans le travail.
Les statistiques ethniques accentuent la victimisation.

Réfutation 5 : Certains pays utilisateurs ont institutionnalisé ainsi la ségrégation ethnique

Dans le passé, l'Inde, l'Afrique du Sud, les Etats-Unis et en France, le régime de Vichy, ont pratiqué la ségrégation ethnique en produisant des statistiques pour se justifier.
Or, certains de ces pays utilisateurs par le passé de statistiques ethniques les ont abandonnées : Pays Bas, Canada, Etats-Unis, Grande Bretagne. Ce serait donc la preuve que ces statistiques favorisent la ségrégation et ne sont pas bonnes.

Réfutation 6 : Les statistiques ethniques sont pour l'instant illégales en France

Ces données ne peuvent être relevées en France au nom du principe d'indifférenciation.
La loi Informatique et liberté du 6 août 2004, qui découle d'une directive européenne, interdit de collecter des données à caractère personnel concernant les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques, religieuses, l'appartenance syndicale, la santé, la vie sexuelle.

Réfutation 7 : Les statistiques ne permettent pas d'en déduire l'existence de la discrimination.

En effet, les discriminations peuvent avoir d'autres sources qu'ethniques : par exemple, des sources sociales.


Mon avis, réduit à mon expérience professionnelle:

Mon constat s'appuie sur un document existant dans tous les services de police: le registre de garde à vue. Il s'agit d'un registre administratif sur lequel sont consignées toutes les mesures de garde à vue décidées par les officier de police judiciaire. Y sont également consignés les droits des individus (avocat, médecin et avis famille), heures d'audition, etc... Chaque livre contient environ 200 feuillets.
En regardant ce livre, on constate, sur ce sujet, que, effectivement, un grande majorité des décisisons prises le sont à l'encontre de personnes d'origines étrangères. Principalement d'Afrique du nord ou d'Afrique noire.
Ca, c'est un constat. Là où ca devient "glissant", c'est de faire,  à partir de ces chiffres, des déductions. Donc, attention.
La facilité pourrait tout simplement faire dire que, de par ces statistiques, on en conclue que les personnes originaires d'Afrique du nord sont plus "criminogènes" que les européens. Mais c'est trop facile.

En ce qui me concerne, j'y vois plutôt des questions à se poser:
- ne peut-on pas penser qu'il s'agit-là d'un échec du système français quand à l'intégration de immigrés (des générations anciennes)? au travers de cela, un échec de notre système social
Je sais que d'autres y verront une autre déduction: certains diront que, tout simplement, les policiers procèdent plus facilement à des contrôles vis à vis des gens de "couleur" que vis à vis d'européens. Peut-être est-ce vrai, je ne sais pas. Mais, là aussi, cela peut tout simplement être une incidence de la première statistique dont on parlait plus haut.
Après, bien évidemment, il faut être clair. C'est n'est pas parce qu'un individu est maghrébin qu'il est délinquant; et vice-versa, ce n'est pas parce qu'il est franco-français, ou européen (d'origine) qu'il ne l'est pas. Ca serait trop simpliste et réducteur.

qu'en pensez-vous?